Les riverains ont surtout observé et subi l’extension des nuisances tout au long de l’année. En cette période des bilans et projets, faisons le point et essayons de trouver des raisons de croire en l’avenir.
Comme par le passé l’ADRA a fait entendre les revendications des riverains. Nous avons rencontré à plusieurs reprises au courant de cette année la direction de l’Aéroport, le Service de l’Environnement, quelques membres du CA ainsi que le Préfet. Nous avons participé à la Commissions de l’Environnement, à la Commission Tripartite et avons rencontré l’ACNUSA. L’ADRA siège également à la Commission Consultative d’Aide aux Riverains, CCAR, pour l’attribution des aides pour l’insonorisation des logements. Sans parler des nombreux échanges et réunions de travail avec les cinq associations de riverains d’Allemagne et de Suisse. Les riverains peuvent s’informer sur notre site Internet en suivant l’actualité et en consultant les nombreux dossiers relatifs aux nuisances.
Vols de nuit, le fléau des riverains.
A en juger par le nombre de questions et réclamations parvenues à l’ADRA, les riverains ont pu constater une augmentation du bruit en 2015 et 2016, essentiellement aux heures nocturnes (22h-24 et 6h-7h).
L’aéroport de Bâle-Mulhouse est passé aux horaires d’hiver après un été marqué par une hausse dramatique des mouvements de nuit, surtout en ce qui concerne les décollages vers le sud entre 23 et 24 heures.
Au 30 septembre 2016, les mouvements ont augmenté de 3% par rapport à la même période de 2015. La hausse des mouvements de nuit, atterrissages et décollages, a été de 5,4% et ils représentent désormais 9,4 % du trafic total. Cette hausse a été de 1% au nord et de 26.5 % au sud.
Le nombre de décollages vers le sud a carrément explosé entre 23 et 24 heures.
Pendant la période estivale du 1er juin au 30 septembre 2015, 90 décollages ont eu lieu dans cette tranche horaire.
Pendant la même période de 2016, ce chiffre a bondi à 155, soit une augmentation de 70 %. Sans parler de la nuit perturbée par le rapatriement en pleine nuit des visiteurs de l’Europa League de football de Bâle le 19 mai.
Cette augmentation des vols de nuit est évidemment accompagnée par un saut tout aussi important des nuisances sonores et entraine une frustration, un stress et un ras-le-bol au sein de la population riveraine, à tel point que les élus s’en émeuvent.
Ainsi, la Commission de l’environnement et de l’énergie du parlement de Bâle-campagne, à l’unanimité, veut obliger le gouvernement à s’engager plus fermement contre les nuisances sonores causées par les aéronefs, en particulier pour le repos nocturne entre 23 et 6 heures, ainsi que pour des taxes aériennes plus élevées.
Développement jusqu’où?
De façon générale, le transport aérien mondial doublera d’ici 2030. Airbus à un carnet de commande rempli sur les dix ans à venir. L’Aéroport de Bâle-Mulhouse connait une croissance soutenue supérieure aux aéroports européens depuis 10 ans.
L’Euroairport élabore un plan stratégique d’extension jusqu’en 2030 (Stratégie Euroairport 2030).
Mise en perspective :
– en 2008, mise en service la zone 6bis pour les aménageurs d’intérieur et la maintenance,
– en 2015, extension du fret Nouveau Cargo Terminal en zone 4,
– Extension du système de tri-bagages à partir de 2016
– Extension des parkings et construction d’un parking silo, mise en service fin 2017
– Création de la zone 6, pour activités liées au transport aérien (Business Center)
– Projet de raccordement ferroviaire avec une station au niveau de l’aérogare.
les études d’avant-projet seront lancées et l’enquête publique est prévue pour début 2018.
– Projet d’implantation d’un hôtel dans le secteur Suisse
– Prolongement du tram 3 jusqu’à l’Aéroport
– Projet d’une 3ème piste, pour laquelle les terrains sont gelés depuis 1996 !
Les Autorité Françaises n’ont pas encore réagi au projet Suisse d’extension de l’Aéroport à l’horizon 2030. Nous avions alerté le 8 mars 2016 la Préfecture du Haut-Rhin des plans LUPO/PSIA de la Confédération. Les services semblaient découvrir l’ampleur de ces projets et ont transmis au Ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer responsable des transports. La DGAC attends une réponse avant la fin de l’année !
(La DGAC nous a cependant confirmé le 30 mai 2017 que « préalablement à sa publication en ligne en mai 2013, la fiche PSIA a fait l’objet d’échanges à haut niveau entre la DGAC et l’OFAC. Il convient de noter que le PSIA s’appuie sur les mêmes hypothèses d’infrastructure et de trafic que le scénario à long terme du plan d’exposition au bruit en vigueur, PEB du 25.10.2004. »
En d’autres mots, la France poursuit les mêmes projets de développement !)
Par rapport au passé, où les riverains étaient mis devant les faits accomplis, la direction de l’Aéroport a assuré l’ensemble des représentants des associations de riverains lors de la Commission Tripartite, qu’ils seront associés de manière appropriée à ce processus de développement.
Nonobstant ces promesses, l’ADRA exige que les critères environnementaux et sociaux, tels que la santé et la qualité de vie, soient pris en compte. Notre avenir ne doit pas dépendre du toujours plus à n’importe quel prix, mais d’un développement raisonné, équilibré et durable.
Le soutien ténu des élus
Avec notre motion d’avril 2016 nous avons redemandé aux communes de s’engager par tout moyen à leur disposition pour demander la réduction des nuisances. Les municipalités de Bartenheim et Wentzwiller ont voté la motion de l’ADRA dans laquelle figure entre autres l’extension du repos nocturne. D’autres communes sont sur la même longueur d’onde mais n’ont pas encore pris position officiellement. Les riverains attendent avec impatience leur engagement et déplore par la même occasion que les représentants de ces mêmes communes sont souvent absents aux commissions.
Le repos nocturne entre 23 et 6 heures est indispensable pour le bien-être et la santé des riverains. C’est une question de santé publique.
L’ADRA sera toujours présente pour atteindre cet objectif.
Nous revendiquons en plus du repos nocturne, le partage équitable des nuisances de part et d’autre de la frontière et notamment la révision des procédures de vol (ELBEG, LUMEL, …) en vue d’une réduction globale des nuisances.
Là aussi, la direction de l’Aéroport soutient cette demande des associations de riverains et va solliciter les autorités de l’aviation civile française DGAC et suisse OFAC pour étudier de nouvelles procédures.
Empreinte sonore
Pendant quatre ans, de 2013 à 2016, les associations de riverains des trois pays ont bataillé avec l’Aéroport pour la réalisation d’une étude de faisabilité sur la modélisation de l’empreinte sonore (Footprint). Au final pour des résultats modestes : seules les trajectoires de 12 avions ont été modélisés, le niveau de bruit est en moyenne inférieur de 5dBA aux mesures, les chiffres varies fortement (tolérances élevées), la faisabilité est remise en compte par l’Aéroport.
Ce programme permettrait à tout riverain en tout lieu de connaitre le niveau de bruit réel exprimé en LAmax provoqué par les survols, comme le bruit enregistré par les stations de mesure. Contrairement aux cartes du Plan de Gêne Sonore qui ne tient compte que du bruit moyen, l’étude de faisabilité pour la modélisation des empreintes sonores a involontairement montré que les méthodes conventionnelles de calcul du bruit sous-estiment clairement les nuisances sonores subies par les riverains. L’empreinte sonore calculée s’étend au-delà des frontières et suit par exemple la courbe d’envol ELBEG.
Alors que de nombreux aéroports en Europe réalisent annuellement la modélisation de tous les survols pendant une année, l’ADRA exige la réalisation de l’empreinte sonore pour Bâle-Mulhouse.
L’ACNUSA signale en 2016 que tous les grands aéroports français ont l’intention de mettre en place une solution commune de la société ACOEM.
La logique économique et la création d’emplois prime
Malheureusement nos décideurs qui siègent au Conseil d’Administration – Chambres de commerce, autorités locales, administrations, élus – qui au final orientent et décident de l’avenir de l’Aéroport, ignorent ou veulent ignorer que l’augmentation des vols Low-Cost, du Fret et du Fret express sont responsables de l’augmentation des nuisances, en particulier aux heures nocturnes.
Les critères environnementaux et sociaux, tels que la santé et la qualité de vie, ne sont pris en compte qu’à la marge. Et pourtant le bruit et la pollution rendent malade et les biens immobiliers se dévaluent (à Allschwil les pertes pour la zone du «Chleifeld» où les normes du bruit sont dépassées, sont estimés à CHF 1.400.000.000.-). L’Aéroport n’est pas encore en mesure de chiffrer la perte que représenterait la fermeture de l’Aéroport dès 23h au lieu de 24h jusqu’à 6h, soit une heure de moins. De combien est-elle par rapport aux coûts liées aux maladies cardio-vasculaires suites aux troubles du repos nocturne, complications respiratoire et pertes immobilières à cause du bruit ?
Après la guerre en 1949, l’Etat français et la Confédération ont posé en bonne intelligence les fondements d’une infrastructure qui a contribué au développement et à la richesse de notre région frontalière. Les temps ont changé et nous avons aussi la responsabilité du monde que nous laissons à nos enfants et petit enfant à l’horizon immédiat des années 2030 où la Suisse prévoit 147.000 mouvements. Notre avenir ne dépendra pas du toujours plus à n’importe quel prix, mais du développement raisonné, équilibré et durable. Notre avenir commence aujourd’hui.
CR de la Commission Tripartite de l’Environnement du 28.11.2016